Je me rappelle de la valise d’Elise. Une valise en carton
bouilli, brune, triste, aux coins renforcés par du métal. La même que celle que
j’utilisais pour partir au pensionnat.
Les mains d’Elise posées sur la valise. Des mains fortes,
aux doigts solides, aux ongles en coquillages, les petits coquillages roses que
je ramassais au bord de la mer du Nord. Des mains à la paume douce qui appelle
les caresses.
Les bras d’Elise au duvet blond sur la peau mate. Dans le
creux du bras, sa peau sent le miel. Elle a un goût de sel. Il y a un autre
endroit qui sent très bon, la légère cavité de son épaule, juste au dessus de
la clavicule. J’ai lu que les bébés adorent cet endroit chez leur mère. Son cou
part de là.
Le cou d’Elise est long, à la Néfertiti, mais l’attache est
puissante. Le muscle remonte haut sur la nuque et court jusqu’au milieu de
l’épaule. Elle a un dos de jeune homme Elise, et des épaules carrées. Une
mâchoire de garçon buté, le coin du maxillaire très marqué. Encadrée par ces
solides remparts, la bouche d’Elise fait rêver. Le sec, l’humide,
l’entr’ouvert, le tendre, le chaud, le sauvage, l’hésitant, l’abandonné.
Les yeux d’Elise sont couleur forêt. Ils ont la fraicheur
des bois l’été et le scintillement de la lumière à travers les feuilles.
A la hauteur des sourcils, s’emmêle la frange des cheveux
d’Elise. Elise dit « ma tignasse ». C’est tellement dru, elle est
protégée du soleil, du vent et de la pluie. Et puis cela sent bon. Quand je
suis derrière elle, je mets mon nez dans sa tignasse. L’odeur est différente de
celle de sa peau, moins salée.
La valise d’Elise est ouverte. Au fond, un petit papier
carré. Elise fait sa valise. Elle va partir.
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